Cancer de la prostate : la HAS favorable au remboursement de la chirurgie par robot

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Même si une récente étude a conclu qu’un suivi était aussi bénéfique que la chirurgie pour lutter contre le cancer de la prostate, la HAS (Haute-Autorité de Santé, ndrl) vient de se prononcer en faveur du remboursement de l’ablation de la prostate par chirurgie assistée d’un robot. Voici son communiqué :

En France, on estime à près de 20 000 le nombre annuel de prostatectomies totales. Traitement de référence dans certains cas de cancer de la prostate, ces ablations totales sont effectuées soit par chirurgie ouverte soit par laparoscopie, conventionnelle ou robot-assistée.

La Haute Autorité de Santé a évalué la chirurgie robot-assistée et considère que, lorsqu’elle est réalisée dans un cadre organisationnel défini, elle peut représenter une des modalités possibles de prostatectomie totale lors du traitement d’un cancer de la prostate localisé mais sans valeur ajoutée démontrée par rapport aux autres techniques. Elle a formulé en ce sens un avis favorable à son remboursement.

Parmi les différents traitements chirurgicaux des cancers localisés de la prostate, la prostatectomie totale robot-assistée, réalisée par laparoscopie (ou cœlioscopie), a enregistré un essor considérable ces dernières années. En France, le nombre d’établissements de santé équipés en robot chirurgical est passé de 39 en 2011 à 84 en 2015. Et ce seraient près de 40 % des prostatectomies totales qui auraient été réalisées avec cette technique en 2015.

Une modalité chirurgicale possible pour les cancers de la prostate localisés mais toutefois sans progrès majeur par rapport aux techniques déjà existantes

La HAS a évalué la prostatectomie totale robot-assistée et a donné un avis favorable à son inscription au remboursement pour le traitement du cancer localisé de la prostate. Mais, elle a jugé que l’amélioration du service attendu[1] de cet acte était mineure comparativement à la prostatectomie totale par chirurgie ouverte et absente comparativement à la prostatectomie totale par laparoscopie conventionnelle

En effet, 15 ans après son déploiement, il n’existe pas de données qui permettent de conclure à une plus grande ou une plus faible efficacité au niveau carcinologique comme au niveau fonctionnel (incontinences urinaires et dysfonctions érectiles) par rapport aux deux autres modalités chirurgicales.

En matière de sécurité, aucun signalement négatif n’a été identifié dans les données analysées par la HAS. La prostatectomie totale est une intervention hémorragique, et les données disponibles indiquent une diminution des pertes sanguines avec le robot comparativement à la chirurgie ouverte ainsi qu’une durée d’hospitalisation moindre.

Des adaptations organisationnelles impératives

L’introduction de la prostatectomie totale robot-assistée au sein des établissements de santé implique d’importantes contraintes organisationnelles, sur les plans de la gestion des risques, de la gestion des instruments chirurgicaux mais également sur l’agencement du bloc opératoire. Comme pour toute nouvelle technique, la prostatectomie totale robot-assistée nécessite la formation de l’ensemble de l’équipe concernée par sa mise en œuvre.

Aussi, dans son avis, la HAS énonce un certain nombre de conditions et de préconisations : la prostatectomie totale robot-assistée doit être réalisée par des équipes formées, dans des établissements de santé ayant mis en place des procédures dédiées à cette modalité chirurgicale avec notamment un système d’assurance qualité. Il est impératif de standardiser les processus organisationnels, notamment le traitement et la gestion des instruments chirurgicaux, le circuit de stérilisation, la planification du bloc opératoire et le protocole de prise en charge en cas d’urgence cardiorespiratoire. Par ailleurs, la HAS recommande de normer le contenu des formations initiale et continue de l’ensemble des professionnels impliqués dans le processus de la prostatectomie totale robot-assistée et d’engager une réflexion sur la composition de l’équipe chirurgicale.

Rendre le patient acteur de sa décision thérapeutique sur la base d’une information loyale

La Haute Autorité de Santé rappelle en outre le principe de la décision médicale partagée entre les professionnels de santé et le patient pour un choix éclairé entre les différentes modalités de prostatectomie totale. Elle souligne que cette décision doit reposer sur une information claire et loyale des patients sur l’ensemble des techniques disponibles et sur les incertitudes relatives à la valeur ajoutée de la prostatectomie totale robot-assistée.

La HAS considère que des études prospectives comparatives et un suivi à long terme des patients demeurent nécessaires. Par conséquent, la HAS souligne la nécessité d’un suivi de la pratique de la prostatectomie totale robot-assistée par la mise en place de registres dédiés.

[1] Il s’agit de la mesure du progrès par rapport aux traitements de référence Communiqué HAS

CC0 Public Domain /Pixabay

Cancer de la prostate : le suivi serait aussi bénéfique que la chirurgie ?

En 2013 déjà une étude américaine nous apprenait qu’entre 30 et 50% des patients étaient traités à tort pour un cancer de la prostate alors qu’ils pourraient simplement bénéficier d’une surveillance active.

Et parce que les choses ont tendance à se répéter, une nouvelle étude en est récemment arrivée aux même conclusions. Elles ont publiées en septembre dernier dans la revue spécialisée « New England Journal of Medicine ».

L’ablation de la prostate et la radiothérapie n’amélioreraient en rien survie des patients atteints d’un cancer par rapport à la mise en place d’une surveillance dite « active ».

Selon cette vaste étude britannique, une simple surveillance vaut parfois mieux qu’une intervention chirurgicale ou qu’un traitement dont les effets secondaires peuvent parfois être lourds de conséquences.

Avant d’en arriver à cette conclusion, ils ont suivi durant 10 années 1643 volontaires pour qui un diagnostic de cancer localisé de la prostate venait d’être posé. Des hommes qui ont ensuite été répartis en 3 groupes : ceux qui ont fait l’objet d’une ablation de la prostate (chirurgie), ceux ayant suivi une radiothérapie et enfin ceux ayant bénéficié d’une surveillance. Au terme de l’étude 99% des hommes étaient toujours en vie, quelque soit l’approche choisie.

Et si les auteurs de l’étude ont confirmé que chirurgie et traitement étaient bien sûr plus efficaces pour réduire la progression de la maladie, ils ont aussi souligné que sur le plan des effets secondaires, la surveillance active en induisait bien moins (troubles de l’érection, incontinence, troubles intestinaux…)

Cité par le Figaro Santé, le professeur Descotes a déclaré à propos de cette étude «Cela conforte la place de la surveillance active lorsqu’elle est possible dans les options que nous proposons déjà aux patients. Tous les patients ne doivent pas être traités, mais ils doivent tous être correctement informés des options. Soulignons tout de même que dans “Protect”, la moitié des patients sous surveillance active finissent tout de même par avoir un traitement et que le recul n’est que de dix ans.»

Un message qui n’est pas nouveau

Un message qui n’a donc rien de très nouveau. En 2013 une étude américaine nous apprenait qu’entre 30 et 50% des patients étaient traités à tort pour un cancer de la prostate alors qu’ils pourraient simplement bénéficier d’une surveillance active.

Interrogé à l’époque par le NouvelObs, et pour expliquer ce surtraitement des patients, le Professeur Michael Peyromaure du service d’urologie de l’hôpital Cochin, évoquait à la fois des médecins qui pensent que « le cancer de la prostate est forcément un cancer agressif », les patients qui veulent absolument se faire opérer mais aussi la pression des chiffres .

Et de lâcher « Quelques médecins pensent encore que le cancer de la prostate est forcément un cancer agressif (…) puis, il y a une pression des chiffres. Le fait de faire beaucoup d’actes opératoires fait monter dans les classements, augmente le prestige d’un établissement, crée de la notoriété pour l’urologue et même pour quelques uns du privé. Pas pour tous bien sûr, mais cela augmente aussi tout simplement leurs revenus ».